Revenons sur cette mesure, mise en place par le gouvernement par l’arrêté du 23 mars 2020 accordant la garantie de l’Etat aux établissements de crédit et sociétés de financement pour soutenir le financement bancaire des entreprises à hauteur de 300 milliards €. Cette mesure de financement aurait d’ores et déjà bénéficié à près de 500.000 entreprises, dont 90% de TPE, pour un montant total de plus de 100 milliards € selon la Fédération Bancaire Française.
Côté grandes entreprises, la FNAC Darty est le premier grand groupe français à avoir obtenu un prêt garanti à 70% par l’Etat, d’un montant de 500 millions €, consenti par un pool bancaire réunissant neuf établissements (voir l’arrêté du 18 avril 2020). Plusieurs grands groupes français ont également obtenu des financements tels que Air France-KLM, à hauteur de 7 milliards €, et Renault, à hauteur de 5 milliards €. Le financement sollicité par Conforama est toujours en discussion.
En quoi consiste le PGE ?
L’Etat garantit le remboursement des prêts bancaires (principal, intérêts et accessoires) octroyés entre le 16 mars et le 31 décembre 2020, la garantie étant plafonnée entre 70% et 90% du montant du prêt selon la taille et le chiffre d’affaires de l’entreprise.
Quelles sont les caractéristiques du PGE ?
Le montant des prêts garantis ne peut être supérieur à un montant correspondant à 25% du montant du chiffre d’affaires HT réalisé en 2019, ou à deux années de masse salariale pour les entreprises innovantes ou créées depuis le 1er janvier 2019.
Le prêt octroyé comporte (1) un différé d’amortissement d’un an et (2) une clause actionnable par l’emprunteur pour lui permettre, à l’issue de la première année, de décider d’amortir son crédit sur une période de 1 à 5 années supplémentaires.
L’Etat garantit :
> 90% du montant total des prêts consentis aux entreprises ayant employé moins de 5.000 salariés et réalisé un chiffre d’affaires inférieur à 1,5 milliards € lors du dernier exercice clos ;
> 80% du montant total des prêts consentis aux entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires compris entre 1,5 et 5 milliards € au cours du dernier exercice clos ;
> 70% du montant total des prêts consentis aux entreprises qui dépassent les seuils susmentionnés.
Aux termes de l’arrêté du 17 avril 2020, le Gouvernement a souhaité renforcer son engagement – et rassurer les établissements prêteurs – en précisant que la garantie octroyée par l’Etat est “irrévocable et inconditionnelle et valable sur toute la durée du prêt”.
Sauf lorsque ce prêt est octroyé à des entreprises ayant employé plus de 5.000 salariés ou réalisé un chiffre d’affaires d’1,5 milliards € en 2019, les banques ne peuvent exiger aucune autre garantie ou sûreté, et devront donc seules supporter le risque portant sur la quotité résiduelle non garantie par l’Etat. Dans certains cas, les banques pourraient donc préférer refuser la demande de prêt.
Le PGE ne peut pas s’accompagner d’une réduction des concours qui avaient déjà été octroyés à l’entreprise au 16 mars 2020.
Quelles sont les sociétés éligibles au PGE ?
Toutes les entreprises, travailleurs indépendants, exploitants agricoles, associations, à l’exception de certaines sociétés civiles immobilières, des établissements de crédits ou des sociétés de financement.
L’arrêté du 6 mai 2020 a étendu le bénéfice du PGE à certaines sociétés civiles immobilières telles celles de construction-vente, celles dont le patrimoine est majoritairement constitué de monuments historiques ou encore celles dont le capital est intégralement détenu par des organismes de placement collectif immobilier.
Il était ab initio prévu que les sociétés en procédures collectives ne pourraient pas solliciter l’octroi d’un PGE, sauf dans le cas où un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire avait été arrêté.
Depuis l’arrêté du 6 mai 2020, la situation est la suivante :
> si la procédure collective a été ouverte avant le 1er janvier 2020, l’entreprise ne peut pas bénéficier du PGE, sauf si un plan de sauvegarde ou de redressement a été arrêté ;
> si la procédure collective a été ouverte à compter du 1er janvier 2020, l’entreprise peut bénéficier du PGE.
L’idée du Gouvernement, conforme aux lignes directrices de la Commission européenne adoptées le 19 mars 2020, est de permettre aux entreprises souffrant des conséquences de la crise sanitaire d’avoir accès au PGE.
Le Gouvernement a indiqué que les grandes entreprises qui bénéficieront de ce PGE ne pourraient pas, au cours de l’année 2020, verser de dividendes ou procéder à des rachats d’actions.
Quel est le coût du PGE ?
Le coût du prêt sera constitué du coût inhérent à chaque établissement bancaire (principalement le taux d’intérêt, étant précisé que celui-ci est actuellement proche de 0% pour la première année), sans marge, auquel s’ajoutera le coût de la garantie par l’Etat (dont le barème est public) représentant 0,25% ou 0,50% du montant du prêt emprunté selon la taille de l’entreprise.
Comment bénéficier du PGE ?
Initialement, seuls les établissements bancaires et les sociétés de financement pouvaient octroyer un PGE. Depuis la loi n°2020-473 du 25 avril 2020, les prêts peuvent également être accordés par des intermédiaires en financement participatif.
La procédure varie selon la taille et le chiffre d’affaires de l’entreprise :
Concernant les entreprises employant moins de 5.000 salariés ou réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 1,5 milliards € en France:
1. L’entreprise doit se rapprocher au préalable d’un ou plusieurs organismes prêteurs pour effectuer une demande de prêt
Il est possible de solliciter plusieurs prêts auprès de différents établissements bancaires, de sociétés de financement ou d’intermédiaires en financement participatif, dans la limite du montant maximal déjà indiqué (25% du chiffre d’affaires 2019 ou 2 ans de masse salariale).
Le dossier de demande de prêt doit comprendre :
> une demande écrite présentant l’entreprise, motivant ses besoins de trésorerie et précisant les difficultés rencontrées en raison de la crise sanitaire actuelle et les autres mesures déjà sollicitées (report de cotisations sociales et fiscales, suspension des loyers commerciaux et charges, etc. – étant précisé que le PGE peut se cumuler avec d’autres aides mises en place par le gouvernement) ;
> un plan prévisionnel de trésorerie ;
> un bilan comptable de moins de 12 mois ou, à défaut, si les comptes certifiés ne sont pas disponibles, une attestation établie par l’expert-comptable ou le commissaire aux comptes pour l’exercice 2019.
2. Après examen de la situation de l’entreprise, l’organisme prêteur doit donner un pré-accord pour le prêt sollicité
Si l’organisme prêteur décide d’octroyer le prêt, et que ce prêt est conforme aux conditions d’éligibilité susmentionnées, le prêt octroyé est automatiquement garanti par l’Etat.
Cependant, les organismes prêteurs n’étudient pas les demandes de prêt sous le seul prisme des critères établis par le Gouvernement dès lors qu’une part du risque (de 10% à 30% selon les cas) reste à leur charge. La cotation FIBEN (qui dépend de la capacité d’une entreprise à honorer ses engagements financiers à horizon d’1 à 3 ans) est prise en compte par les banques lors de l’examen du dossier, bien qu’il ne s’agisse pas d’un critère d’éligibilité au PGE – ceci est d’ailleurs expressément mentionné dans la dernière version de la foire aux questions (FAQ) du Prêt garanti par l’Etat rédigé par le Ministère de l’Economie et des Finances.
Les organismes prêteurs restent donc souverains dans la décision d’octroyer ou non le prêt. Le principe de la liberté de crédit n’est donc pas remis en cause en dépit du contexte actuel exceptionnel qui entraîne des besoins de financement inédits pour les entreprises.
Selon la dernière FAQ du Ministère de l’Economie et des Finances sur le sujet, lorsque le chiffre d’affaires de l’entreprise est inférieur à 10 millions € (ou, le cas échéant, un seuil supérieur fixé par la banque), les banques s’engagent à donner leur réponse dans un délai de 5 jours à compter de la réception du dossier.
La loi n°2020-473 du 25 avril 2020 prévoit également que les organismes prêteurs doivent notifier par écrit les refus d’octroi d’un PGE de moins de 50.000 € aux entreprises répondant au cahier des charges.
En pratique, il existe néanmoins des témoignages de chefs d’entreprises faisant état de difficultés rencontrées dans le traitement de leur dossier, d’un délai de réponse rallongé ou encore d’un refus de prêt sans motif…
3. L’entreprise doit transmettre sa demande en se connectant sur la plateforme Bpifrance afin d’obtenir un identifiant unique qui sera communiqué à l’établissement bancaire
L’entreprise doit fournir un certain nombre d’informations notamment sa date de création, son numéro Siren, les informations sur le prêt (montant du prêt et taux d’intérêt) et le nom de l’organisme prêteur ayant octroyé le prêt.
Comme il a été mentionné supra, le prêt octroyé par l’organisme prêteur est automatiquement garanti par l’Etat. Bpifrance fait seulement office de chambre d’enregistrement de l’accord de l’établissement de crédit. Elle ne contrôle pas les conditions d’éligibilité qui demeurent de la seule responsabilité de l’établissement bancaire.
L‘entreprise ne pourra solliciter qu‘une seule demande de prêt garantie par l‘Etat (qui pourra, le cas échéant, regrouper plusieurs prêts sous réserve de respecter la limite susmentionnée). Par conséquent, un seul numéro d’identification unique est attribué. Il est donc recommandé aux entreprises de veiller à obtenir le pré-accord de tous les établissements bancaires avant de déposer leur demande sur la plateforme de Bpifrance.
Les informations renseignées dans le formulaire de Bpifrance ne sont plus modifiables une fois enregistrées.
4. Après confirmation du numéro unique, l’établissement bancaire accorde le prêt
L’établissement bancaire accordera le prêt aux conditions convenues et les fonds seront remis, selon la Fédération Bancaire Française, dans les « meilleurs délais ».
En cas de difficulté ou de refus de transmission de l’identifiant, les entreprises peuvent adresser un email à l’adresse suivante : supportentreprise-attestation-pge@pgefrance.fr
Concernant les entreprises employant au moins 5.000 salariés ou réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 1,5 milliards € en France :
1. L’entreprise doit se rapprocher au préalable d’un ou plusieurs organismes prêteurs pour effectuer une demande de prêt et obtenir un pré-accord
2. L’entreprise doit ensuite transmettre sa demande à Bpifrance
La demande est instruite par la Direction générale du Trésor qui vérifie notamment que la garantie ne portera pas atteinte aux règles européennes relatives à la concurrence.
3. La garantie de l’Etat est accordée par un arrêté individuel du Ministre de l’Economie et des finances
La publication des arrêtés individuels au Journal Officiel permettra de savoir à quelles entreprises françaises les établissements bancaires ont octroyé un prêt, et à quelles conditions.
Que faire en cas de refus d’octroi du prêt ?
Selon la Fédération bancaire française, le taux de refus d’octroi d’un PGE est actuellement inférieur à 5%. Certaines entreprises, dont la structure financière est fragile, se heurtent en effet à un refus alors même que cette perfusion de trésorerie leur est indispensable pour faire face à la crise sanitaire.
Dans ce cas, l’entreprise peut saisir le Médiateur du crédit dont l’une des missions est d’accompagner les entreprises dans leurs difficultés concernant l’octroi de prêt garanti par l’Etat.
L’entreprise devra également, si cela n’est pas déjà fait, mettre en place toutes les mesures utiles afin de préserver sa trésorerie, notamment en sollicitant des délais de paiement auprès de ses principaux créanciers (en ce sens Flash info n°10).
Par ailleurs, en dehors du prêt garanti par l’Etat, Bpifrance a mis en place plusieurs mesures telles que des garanties des établissements bancaires à hauteur de 90% en cas d’octroi d’un prêt de 3 à 7 ans ou en cas d’octroi d’un découvert de 12 à 18 mois. Bpifrance octroie également directement des prêts sans garantie sur 3 à 5 ans, avec un différé de remboursement, d’un montant allant de 10.000 € à plusieurs millions € pour les PME et les ETI.
La loi n°2020-473 du 25 avril 2020 prévoit que l’Etat pourra lui-même accorder un prêt participatif, créé par la loi du 13 juillet 1978, aux très petites entreprises ou à des petites entreprises qui n’ont pas pu bénéficier du prêt garanti par l’Etat. Les modalités d’octroi de ce prêt seront précisées ultérieurement.
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